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Des scientifiques trouvent des preuves d’une périlleuse

Des scientifiques trouvent des preuves d'une périlleuse opération du cerveau pratiquée il y a 3 000 ans


Il est difficile d’imaginer que des médecins puissent pratiquer une
intervention aussi invasive et délicate que la chirurgie du cerveau sans
équipements modernes. Pourtant, les historiens ont prouvé à maintes
reprises que les origines de cette procédure remontent à des milliers
d’années. Certains pensent même que la neurochirurgie est la plus ancienne
« spécialité » médicale de tous les temps.


D’anciens papyrus égyptiens, par exemple, ont été exhumés et décrivent des
interventions telles que la suture crânienne et le concept de liquide
céphalo-rachidien. Il a même été démontré qu’ils contenaient les grandes
lignes d’opérations neurochirurgicales complexes.


Cette semaine, dans la revue

PLOS ONE
, une équipe d’historiens a annoncé la découverte de preuves d’un type
spécifique d’opération cérébrale, appelée trépanation à encoche angulaire,
pratiquée sur un homme qui vivait en Israël il y a plus de 3 000 ans.


Cette information est sidérante si l’on considère qu’au 15e siècle avant
J.-C., la morphine, les antibiotiques, l’anesthésie générale et autres
salles d’opération n’existaient pas. Le plus important, c’est que la
connaissance de cette chirurgie antique pourrait faire progresser la
chronologie des progrès de la médecine depuis l’aube de l’existence
humaine.


«

Nous avons la preuve que la trépanation a été un type de chirurgie
universel et répandu pendant des milliers d’années

», a déclaré dans un communiqué Rachel Kalisher, doctorante à l’Université
de Brown et responsable de l’analyse de l’équipe. «

Mais au Proche-Orient, nous ne le voyons pas si souvent. Il n’y a
qu’une douzaine d’exemples de trépanation dans toute cette région.

»

crane trepanation 1 



Rachel Kalisher travaillant sur le site de Megiddo, en Israël. Rachel
Kalisher


«

Dans l’Antiquité, il y avait beaucoup plus de tolérance et beaucoup
plus de soins qu’on ne le pense

», poursuit la chercheuse. «

Nous avons des preuves, littéralement depuis l’époque des
Néandertaliens, que les personnes s’occupaient les unes des autres,
même dans des circonstances difficiles.

»


Qu’est-ce que la trépanation ?


La trépanation consiste à percer un trou dans le crâne à l’aide d’une
perceuse, qui pouvait être un outil en pierre à l’époque, pour traiter les
blessures à la tête ou soulager la douleur. Sauf que 10 000 ans avant
Jésus-Christ, le trou percé était censé être le remède, et était donc
permanent. C’est précisément la raison pour laquelle les scientifiques ont
pu observer des preuves aussi nettes de trépanation chez leur sujet du 15e
siècle. Aujourd’hui, ce qui se rapproche le plus de la trépanation est la
craniotomie. La grande différence est que les médecins modernes s’efforcent
de remplacer le morceau de crâne perforé le plus rapidement possible. Les
craniotomies sont rares, généralement pratiquées pour traiter des
anévrismes, enlever des tumeurs cérébrales ou soulager la pression dans le
cerveau pour d’autres raisons.


L’un des deux squelettes, enterré à côté de poteries fines et d’autres
biens de valeur sous une résidence cossue à Tel Megiddo, en Israël,
présentait un trou carré d’environ 30 millimètres dans l’os frontal du
crâne. La forme carrée est intéressante car, selon les chercheurs, nous ne
savons toujours pas pourquoi certains restes de trépanation sont
triangulaires alors que d’autres sont carrés et d’autres encore sont
circulaires. On peut supposer que ces individus étaient frères, mais l’un
d’eux serait mort jeune, dans son adolescence ou au début de la vingtaine.
L’autre est probablement décédé entre 20 et 40 ans.

crane trepanation 2 



(A,B) Vues agrandies de la trépanation. (C) Les quatre bords de la
trépanation. (D) Emplacement reconstitué de la trépanation sur la tête.
Kalisher et al. 2023, PLOS ONE, CC-BY 4.0


Le fait qu’un individu de haut rang au 15e siècle ait eu besoin d’une
procédure aussi invasive est intriguant. À l’époque, les membres de l’élite
ne devaient probablement pas travailler autant que d’autres classes
sociales moins favorisées, bénéficiaient d’une nourriture nutritive et
pouvaient être soignés par les meilleurs professionnels de santé. Ils
étaient vraisemblablement susceptibles de survivre à une maladie grave plus
longtemps qu’une personne n’appartenant pas à l’élite.


L’équipe de chercheurs s’est donc demandé ce qui avait pu pousser l’un de
ces frères aisés à accepter une trépanation. Après une analyse plus
approfondie, ils ont trouvé quelques réponses possibles. Par exemple, les
chercheurs ont observé plusieurs anomalies squelettiques dans les restes
des dépouilles, ce qui les a amenés à penser que le duo pouvait souffrir
d’une sorte d’anémie ferriprive qui aurait pu avoir un impact sur leur
développement dès l’enfance. Le frère aîné présentait également une suture
crânienne et une molaire supplémentaire, ce que Rachel Kalisher relie au
syndrome congénital de dysplasie cléidocrânienne. Les personnes atteintes
de cette maladie rare possèdent des os de forme différente et plus
fragiles.

crane trepanation 3 



(A) La zone où les restes ont été trouvés, avec la tombe surlignée en
jaune. (B) Une photographie du site funéraire et des restes. (C) Un
dessin composite où un individu est représenté en bleu et un autre en
vert. Kalisher et al. 2023, PLOS ONE, CC-BY 4.0


De plus, comme l’explique la scientifique, un tiers d’un squelette et la
moitié de l’autre présentent des signes de porosité, de lésions et
d’inflammation de la membrane recouvrant les os, ce qui suggère que la mort
des frères est probablement due à une maladie infectieuse telle que la
tuberculose ou la lèpre. «

La lèpre peut se propager au sein des unités familiales, non seulement
en raison de la proximité, mais aussi parce que votre susceptibilité à
la maladie est influencée par votre paysage génétique

», explique-t-elle «

Dans le même temps, la lèpre est difficile à identifier car elle
affecte les os par étapes, ce qui peut ne pas se produire dans le même
ordre ou avec la même gravité pour tout le monde.

»


Une enquête plus approfondie est nécessaire pour décoder totalement ce qui
est arrivé à ces deux frères. Mais une chose est sûre, comme le note Rachel
Kalisher : si la trépanation était destinée à maintenir le garçon en vie,
cela n’a pas fonctionné. L’équipe a déterminé que le patient est décédé
dans les jours, les heures ou peut-être même les minutes qui ont suivi
l’opération.




Article de CNET.com adapté par CNETFrance


Image Une : Kalisher et al., 2023, PLOS ONE, CC-BY 4.0


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