L’année 2022 offre aux acteurs économiques un espace propice à la mise en œuvre des stratégies de recentrage. Pour rester compétitifs ou leaders sur leur marché, ou pour continuer à créer de la valeur, de nombreux groupes font le choix de céder des activités connexes ou en perte de vitesse. Le carve-out qui s’impose réclame alors une préparation rigoureuse car l’activité ou business unit qui sera détourée est souvent répartie dans une ou plusieurs entités du groupe et dans différents pays quand l’activité est internationale. Ces business units peuvent en outre être liées à d’autres activités du groupe ou dépendre des fonctions support du groupe. Elles ne seront donc pas immédiatement autonomes et transférables. Outre les aspects humains et managériaux déjà évoqués (lire ci-dessous), le vendeur devra donc prendre en compte cette absence d’autonomie et déterminer comment la division, objet du carve-out, pourra acquérir celle-ci et être transférable.
Anticiper les enjeux de calendrier et de coordination
Le détourage d’une activité requiert d’intervenir sur toutes les dimensions – opérationnelle, juridique, commerciale, sociale et managériale, économique et financière. Cette intervention multi-dimensionnelle de différentes équipes et compétences a un impact sur le calendrier.Un carve-out dure en moyenne entre 12 et 18 mois. En pratique, l’opération peut s’avérer plus longue lorsqu’elle est imposée par des contraintes légales liées notamment aux enjeux de concurrence. Un autre facteur peut impacter le calendrier : l’identité du cessionnaire. Lorsque l’activité est transférée à un acteur industriel, la business unit peut être intégrée à un environnement existant, ce qui la rend plus facilement cessible. En revanche, si l’activité détourée fait l’objet d’un LBO, celle-ci doit être totalement autonome. Compte tenu de cette multi-dimensionalité , une planification très précise et interdisciplinaire doit être mise en place, ce qui implique une coordination étroite entre les équipes de la direction juridique ou M&A du vendeur et les équipes commerciales, opérationnelles, financières, IT et RH de la division transférée ou des autres équipes du vendeur. L’enjeu de calendrier est d’autant plus critique que durant toute cette période, le management de l’activité détourée doit rester motivé et concentré sur la gestion de l’opérationnel, nonobstant les nombreuses sollicitations que la préparation du carve-out implique, au risque de voir la valeur de l’activité et donc le prix de cession diminuer.
Evaluer les actifs transférés et identifier les prestations de support qui devront être fournies par le vendeur
Isoler et évaluer les actifs nécessaires à l’activité détourée constitue sans doute la tâche la plus stratégique de l’opération. Cette phase d’identification et d’évaluation est importante pour le vendeur car cela lui permet de bien cibler le niveau de prix souhaité et d’être en capacité de délivrer ce qu’attend tout acquéreur, à savoir le fonctionnement autonome et normal de la business unit conformément aux pratiques passées ; le détachement du groupe vendeur devant être sans impact. Cela impose souvent de réfléchir à la mise en place de prestation de services en matière comptable, informatique, RH et autres que le vendeur s’engagera à fournir après la réalisation de l’opération de carve-out pour garantir la continuité de l’activité et son autonomie totale. Nombreux sont les cas où le vendeur n’a pas correctement identifié ces enjeux, entraînant ainsi un retard significatif dans le calendrier et un surcoût pour le vendeur dans les prestations à rendre à l’acquéreur. Ces prestations feront l’objet d’un Transitional Services Agreement. Ce contrat conclu entre le cédant et le cessionnaire, est une pièce essentielle du carve-out puisqu’il détermine l’étendue des obligations du vendeur après la réalisation de la cession et formalise le coût et la durée de l’accompagnement du vendeur après le closing. Les prestations à fournir et la durée desdites prestations doivent être bien calibrées, afin d’assurer l’autonomie de l’activité cédée. A défaut, le vendeur s’expose à devoir continuer les prestations de service sur une période plus longue qu’escomptée et à avoir potentiellement un contentieux avec l’acquéreur s’il n’est pas en mesure de délivrer ce qu’il a promis.
Sécuriser le transfert des engagements contractuels
Les aspects juridiques d’une opération de carve-out occupe également une place stratégique. En effet, pour assurer le transfert de l’activité détourée, il convient dans un premier temps d’identifier ses contrats clés : clients, fournisseurs, sous-traitants, baux, financements, emprunt, etc… Leur transfert nécessitera en général une adaptation de l’environnement juridique. En effet, très rares sont les engagements qui peuvent changer de main sans l’intervention de l’homme du droit. Il peut ainsi s’agir d’obtenir la mainlevée d’un nantissement ou des autorisations réglementaires, de transférer des certifications ou de négocier le maintien des conditions commerciales du groupe pour certains contrats transférés. Rien ne doit être laissé au hasard, et tous les éléments doivent être traités avec la plus grande attention. Il en sera de même pour les droits de propriété intellectuelle ou les systèmes d’information pour lesquels il conviendra de déterminer si certains accords contractuels doivent être mis en œuvre, tel que par exemple un contrat de licence.
Maintenir les équipes affectées à l’activité détourée
Le vendeur devra enfin procéder à une revue très précise des ressources humaines attachées à l’activité détourée et assurer le maintien des équipes qui y sont affectées, ces éléments participant pleinement à la valorisation de ladite activité. Autre point crucial dans la réussite d’un carve out : la gestion du volet IT et la nécessaire migration des systèmes d’information liés à l’activité détourée du vendeur vers l’acquéreur et l’opérabilité desdits systèmes dans un environnement autre que celui du vendeur.
Cas particulier de l’activité en décroissance
Lorsque l’activité cédée est en décroissance, il est recommandé que le vendeur procède à un certain nombre de diligences et qu’il vérifie la solidité financière de l’acquéreur. En effet, en cas de procédure collective, sa responsabilité pourrait être recherchée si le vendeur n’a pas procédé aux vérifications requises, telles que la solidité du business plan du repreneur, la capacité à financer l’activité sur le court et moyen terme, etc… Il est donc essentiel que la documentation légale reflète les diligences effectuées par le vendeur et que le vendeur détermine s’il doit prendre des précautions additionnelles, telles que l’ouverture d’une procédure de mandat ad hoc ou de conciliation.
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