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La blockchain au service de la traçabilité alimentaire

La blockchain au service de la traçabilité alimentaire


L’industrie agroalimentaire est régulièrement secouée par des scandales sanitaires, ébranlant la confiance des consommateurs. La crise de la Covid-19 mais aussi l’urgence du défi climatique n’auront fait qu’élever le niveau de transparence réclamé par ces derniers.

Devenus « consom’acteurs », les clients exigent de savoir précisément d’où viennent les produits qu’ils achètent, privilégiant si possible les producteurs locaux. Selon une étude Ipsos pour E.Leclerc, les Français se tournent davantage vers les produits d’origine France (45%) et ceux issus des circuits courts (37%). L’origine est même le premier critère de choix pour les fruits et les légumes.

L’achat militant devient une illustration de ces convictions. Le succès d’une plateforme de notation comme Yuka ou de la marque « C’est qui le Patron ?! » montre combien les consommateurs sont de plus en plus enclins à acheter des produits sans OGM, respectueux du bien-être animal, apportant une juste rémunération aux agriculteurs et limitant l’émission de CO2.

Face à cette évolution des comportements, l’industrie agroalimentaire se doit de tracer ses chaînes d’approvisionnement, du fabricant au consommateur. La technologie de la blockchain répond idéalement à ce cas d’usage. 

Elle permet de consigner, dans un registre numérique décentralisé et infalsifiable, toutes les informations utiles sur la provenance d’un produit, ses conditions de fabrication et de stockage et les différentes étapes de son transport.

Casser les silos

La blockchain est aussi une réponse au morcèlement des flux d’informations disséminées entres les systèmes d’information des différents acteurs, qu’ils soient producteurs, industriels de l’agroalimentaire, logisticiens ou transporteurs. En les interconnectant, ce méta-système va créer un point entre les silos de données dans une approche non plus verticale ou horizontale mais transversale. 

Les acteurs d’un écosystème vont partager un certain nombre d’informations en termes de gestion des stocks ou de référencement des fournisseurs. Si un maillon de la chaîne ne respecte pas un critère du cahier des charges, c’est toute la chaîne qui en pâtit. La blockchain, devient non pas la trace mais la preuve de la trace. 

Elle va authentifier le respect d’un processus via des algorithmes de consensus et des contrats intelligents (smart contracts), sans faire appel, comme jusqu’alors, à un tiers de confiance. La preuve sera alors distribuée sur l’ensemble du réseau.

La donnée associée à sa preuve devient un marqueur de confiance qui facilite la coordination et la collaboration entre acteurs. Un transporteur qui n’apporterait pas les preuves de sa fiabilité pourrait se voir écarté d’un marché. En cas de litige, comme la perte d’un container, la blockchain évite l’effet boîte noire et révèle la responsabilité de son auteur. Walmart a ainsi diminué par dix le temps de résolution de litiges avec ses sous-traitants. 

Cette traçabilité répond, par ailleurs, à des enjeux de conformité réglementaire comme le respect de la chaîne du froid ou la lutte contre la contrefaçon (AOP/AOC). Le défi n’est pas que technologique. L’une des difficultés majeures de ce type de projet est de parvenir à réunir des acteurs, parfois concurrents et aux intérêts divergents, afin qu’ils s’inscrivent dans une logique de coopétition. Rendre son système d’information auditable n’est pas antinomique avec le souci de protéger un savoir-faire.

IBM rassemble, au sein du consortium Food Trust, des géants de la distribution alimentaire comme Walmart, Nestlé, Unilever ou Carrefour. Depuis 2019, le même Carrefour fait appel à sa propre blockchain pour authentifier la provenance du poulet d’Auvergne, de la tomate Cauralina, des œufs fermiers de Loué, du fromage Rocamadour AOC ou du lait frais Gillot. D’ici à 2022, l’objectif du distributeur français d’appliquer cette technologie à tous ses produits alimentaires.

Entre les blockchains privées ou publiques, la multiplication des initiatives fait toutefois craindre une inflation du nombre des plateformes. Il faut donc créer les conditions pour favoriser une plus grande interopérabilité afin que les différentes blockchains puissent communiquer entre elles. 

Après des années de tâtonnements pour faire émerger de manière opérationnelle les projets intégrant de la blockchain dans le secteur agroalimentaire, nous touchons enfin du doigt les avantages et les nécessités que cet outil technologique va apporter à l’ensemble des acteurs des filières, pour peu qu’ils arrivent, humainement, à interagir ensemble.




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